Adresse à propos des élections présidentielle et législatives de 2017

La mobilisation monte dans le pays pour exiger le retrait de la loi travail. Le gouvernement est enfin placé sur la défensive. Tout se passe comme s’il s’agissait de la goutte d’eau de trop. Une victoire du mouvement aurait une grande importance. Elle pourrait améliorer le rapport de force au sein du pays en faveur de ceux qui proposent une autre politique, refusant la politique de l’offre et les logiques austéritaires.

Au même moment, un calendrier d’organisation d’une primaire « à gauche » vient d’être annoncé. Cette initiative, incluant des personnalités et des forces politiques dont celles qui gouvernent aujourd’hui, vise à construire une candidature unique au 1er tour contre la droite et l’extrême-droite.

Nous avons exprimé à plusieurs reprises notre opposition à cette initiative. Les prochaines échéances électorales doivent être l’occasion de proposer aux pays des projets politiques clairs. La construction d’une candidature unique, rassemblant les instigateurs de la loi El Khomri et ceux qui la combattent, les coutumiers du 49-3 et les partisans de la 6ème République, est tout simplement impossible. Et comment pourrait-il être envisageable de construire un projet commun avec ceux qui organisent la répression contre les travailleurs d’Air France ou de Goodyear, contre les opposants à l’aéroport de Notre-Dame des Landes ou les paysans de la Confédération Paysanne, ou encore ceux qui imposent la déchéance de nationalité pour les binationaux et l’état d’urgence permanent ? Quel compromis serait alors nécessaire pour masquer nos divergences de fond : la désobéissance aux traités européens, une 6ème République par la constituante, un partage des richesses qui oriente concrètement ces dernières vers les revenus du travail, une transition énergétique par la planification écologique qui tourne le dos au nucléaire et aux énergies carbonées ?

Nous savons que certains ont la conviction de pouvoir imposer dans ce cadre un débat et une ligne politique en rupture avec ces choix gouvernementaux. Mais nous la pensons illusoire. Bien sûr, de plus en plus de militants ou d’élus membres du Parti Socialiste sont en désaccord avec la politique menée. Bien sûr il faut débattre avec eux, mais le cadre de débat n’est jamais neutre. Et s’ils finissent par rompre pour de bon, il leur sera d’autant plus aisé de nous rejoindre que nous nous serons mis en mouvement sans attendre le bon vouloir et les injonctions à l’unité de façade de Cambadélis ou Cohn Bendit.

Car en acceptant le cadre de cette primaire la direction du Parti Socialiste cherche à imposer la candidature de François Hollande. Les récentes déclarations de Jean-Christophe Cambadélis en sont une nouvelle démonstration. Tout sera fait pour empêcher qu’émerge de ce cadre une candidature de rupture. Et le caractère censitaire de la primaire, bien mis en valeur en 2011, obère toute possibilité de couper la route dans ce cadre à François Hollande. Dès lors, cette tentative se refermera comme un piège. Cela permettra notamment au Parti Socialiste de reconstruire une photo de famille falsifiée d’une « gauche rassemblée », renforçant encore l’idée d’un « vote utile » déjà usée jusqu’à la corde lors des dernières élections régionales. Et en proposant, avec succès, de repousser en décembre la date d’une éventuelle primaire, il pourra de plus empêcher toute construction alternative d’ici à la fin de l’année 2016.

Nous refusons cette hypothèse terrible. Les primaires sont une impasse. Se réclamer d’un rassemblement de LA gauche au moment où le gouvernement a dénaturé toute référence aux valeurs de gauche est inaudible. L’espoir est ailleurs pour peu qu’on s’engage à le construire. L’heure est à fédérer le peuple autour d’un projet alternatif à la politique gouvernementale et non à prétendre unir un camp fictif qui inclurait F. Hollande et JL Mélenchon.

Jean-Luc Mélenchon a proposé sa candidature. Sa proposition s’adresse à tous les citoyens, partis ou mouvements politiques qui veulent s’y atteler. Elle s’appuie sur un programme, l’Humain d’abord, élaboré par le Front de Gauche en 2012, pour l’actualiser et le compléter collectivement. Elle s’accompagne d’une plate-forme numérique pour permettre à chacun de contribuer à ce travail, et d’être acteur du processus, avant des rencontres dédiées. Elle vise la mise en place d’un mouvement et d’une assemblée représentative pour permettre la représentation de chaque participant, membre ou non d’une force politique. Elle suggère enfin de lier dans une même démarche les élections présidentielles et législatives.

A nos partenaires du Front de Gauche, nous disons : c’est là l’occasion de dépasser positvement ce que nous avons bâti ensemble. Nous avons tiré les bilans depuis 2012. Nous avons constaté qu’à être resté un cartel de partis, le Front de Gauche a perdu sa dynamique. L’engagement récent du PCF, puis d’Ensemble (en tant qu’observateur avant d’annoncer leur retrait), dans le processus des primaires a gelé le Front de Gauche, rendant impossible son expression politique commune et autonome, et causant aussi le retrait de l’une de ses composantes, le PCOF.

Il est temps de repartir de l’avant dans la construction d’une alternative politique.

C’est pourquoi nous nous adressons à toutes les forces politiques que nous avons rencontrées ces dernières semaines ou que nous rencontrerons prochainement : forces politiques du FDG, EELV, ND, NGS, Mouvement Commun, Voix de Gauche, NPA, POI, et autres organisations et courants politiques qui se sont ces dernières années opposés à la politique gouvernementale

Un mois après son lancement, la proposition de Jean-Luc Mélenchon a rassemblé pas loin de 80 000 signatures. C’est un succès. Près de 800 groupes d’appui se sont déjà créés sur tout le territoire, regroupant citoyens dont c’est le premier engagement comme militants venus de tous les horizons : communistes, autogestionnaires, écosocialistes. Déjà, autour de cette proposition, se met en place une dynamique populaire qu’il est nécessaire d’amplifier. Nous pouvons y contribuer.

C’est pourquoi nous vous proposons, à ce stade, de constituer ensemble un comité de liaison des forces politiques soutenant cette proposition. Chacun-e de nos forces pourrait ainsi immédiatemment contribuer à la construction et à la réussite de cette campagne.